Le Cheval d’Espagne

Littérateur populaire très actif dans les décennies 1950-60, André Héléna fait partie de ces auteurs dont l’œuvre a basculé dans l’oubli, remplacée par celle de la génération suivante. Pourtant, il ne mérite pas de finir aux oubliettes, car si sa bibliographie ne brille pas pour son extrême qualité d’écriture, elle recèle quelques pépites que peuvent lui envier nombre de faiseurs de thriller.

Le Cheval d’Espagne forme avec J’aurais la peau de Salvador (1949) une sorte de diptyque consacré à l’après Guerre d’Espagne. André Héléna demeure l’un des rares auteurs à avoir mis en scène de manière bienveillante les acteurs de cette période où les vaincus nourrissaient encore l’espoir de prendre leur revanche. Une sympathie sans doute plus géographique que politique, car si l’on peut douter de l’incursion d’Héléna sur le territoire espagnol pendant le conflit, étant natif de Narbonne, il a forcément été témoin de la Retirada des républicains et de leur internement dans la région.

Le Cheval d’Espagne fournit une belle illustration de cette littérature populaire ne s’embarrassant pas de longues scènes d’exposition ou d’états d’âme interminables. L’intrigue va à l’essentiel, portée par des archétypes campés à gros traits, sans se soucier de vraisemblance. D’ailleurs, le synopsis parait d’emblée complètement fantaisiste, même si certains de ses composants s’appuient sur une réalité historique méconnue, à savoir la continuation de la Guerre d’Espagne sous la forme d’un conflit asymétrique. Un processus dont l’échec de l’expédition du Val d’Aran constitue le point culminant et qui se poursuit sous la forme d’une guérilla urbaine en Catalogne dans les années 1940-50. Pour bon nombre d’anciens combattants républicains, la défaite de l’Allemagne nazie est apparu en effet comme une opportunité pour renverser Franco. Après Hitler viendrait le tour du dictateur espagnol pensaient-ils, quitte à forcer la main aux alliés. Un espoir déçu par la Guerre froide et la criminalisation de la lutte armée.

D’une manière un peu anachronique, André Héléna utilise ce contexte pour broder un récit fertile en rebondissements, où conformément à la philosophie libertaire, l’action prime sur la réflexion. Parmi les personnages, on retiendra surtout la figure d’inquisiteur du Cheval d’Espagne, phalangiste jusqu’au-boutiste, prêt à tout pour éliminer les derniers militants anarchistes réfugiés sur le territoire français.

Problème de riche me dira-t-on, mais me voilà avec un auteur français supplémentaire dont il va falloir creuser l’œuvre. D’ailleurs, si vous avez des suggestions, je suis preneur…

cheval-despagneLe Cheval d’Espagne de André Héléna – e-dite noir, octobre 2000

4 réflexions au sujet de « Le Cheval d’Espagne »

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s