Butcher’s Crossing

butchersAprès avoir quitté Harward où il menait de brillantes études, William Andrews rallie Butcher’s Crossing, au fin fond du Kansas. À l’instar de nombreuses villes champignons de la Frontière, la bourgade attend le coup de pouce décisif du chemin de fer pour se développer. Pour le moment, seuls un saloon, un hôtel, un magasin général, quelques tentes et abris de fortune servent de décor au commerce fructueux des peaux de bison, spécialité de la localité. Point de rassemblement des équipes de chasseurs chargées de traquer le bovidé dans les grandes plaines, les lieux connaissent ainsi une activité prometteuse. Pourtant, depuis quelque temps, le bison se fait rare, victime de la surexploitation et de l’appétit inextinguible des Self made men.

Pour Andrews, Butcher’s Crossing n’est que la première étape d’un voyage initiatique. Un jalon dans sa quête d’absolu et le point de départ vers cette nature sauvage, d’où il espère tirer un sens à son existence. En compagnie de Miller, un chasseur réputé dans la région, il part en expédition vers une vallée cachée dans les Rocheuses où se trouverait une des dernières hardes de bisons.

Découvert dans nos contrées par le truchement d’Anne Galvada (hein?), John Williams délaisse ici le registre de la fresque romanesque pétrie de bruit et de fureur, lui préférant celui du récit naturaliste et du Nature Writing.

Butcher’s Crossing relève à la fois du roman d’apprentissage et du Western. Il tient du premier par son ton, celui d’un jeune homme amené à se révéler grâce à une immersion au cœur des Rocheuses. Quant au second, il faut le rechercher dans histoire de chasse aux bisons au-delà de la Frontière. Sur ce point, l’aventure de Will Andrews fait littéralement voler en éclats les représentations du Grand Ouest. Loin de la figure mythifiée, de son exploitation mercantile par le Buffalo Bill Wild West Show et plus tard par Hollywood, la Frontière de John Williams sert de décor à une galerie de personnages vulgaires et incultes, plus préoccupés par la satisfaction de leurs besoins. Pour cette engeance, la nature apparaît comme une ressource à exploiter, voire à épuiser, histoire d’en tirer un maximum de profit avant de partir ailleurs.

Entre Miller, obsédé par la chasse aux bisons jusqu’à l’absurde, à moins que cette activité ne soit qu’un exutoire à sa folie meurtrière, Charley Hoge, mi-poivrot mi-prêcheur, et Schneider, écorcheur sans autre idéal que celui de prendre du bon temps, le jeune Will Andrews semble en bonne compagnie pour atteindre cet absolu qui semble sans cesse lui échapper. De ce voyage aux frontières de la métaphysique, il retire finalement une certaine amertume et le sentiment d’avoir découvert sa part obscure. En cela, on peut dire effectivement que Butcher’s Crossing a ouvert la voie à Méridien de Sang de Cormac McCarthy.

Maintenant, suivez mon regard. Foncez !

butchers-crossingButcher’s Crossing (Butcher’s Crossing, 1960) de John Williams – Éditions Piranha, 2006 (roman traduit de l’anglais [Etats-Unis] par Jessica Shapiro)

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