L’infinie patience des oiseaux

Attaché à sa terre natale, Jim Saddler a toujours été fasciné par les oiseaux et leurs migrations saisonnières. De sa rencontre avec Ashley Crowther, il tire sa subsistance, le riche fermier lui ayant confié la tâche de tenir le compte des espèces fréquentant les marais et les plages de l’estuaire qui s’étendent sur sa propriété. De sa passion pour les oiseaux naît une solide amitié avec Imogen, cette vieille fille anglaise qui passe son temps à les photographier. Mais, la Grande Guerre les rattrape tous, saisissant Brisbane et le reste du pays d’une fièvre guerrière irrésistible. Jim finit par rejoindre le corps expéditionnaire australien parti combattre en Europe. Sur les champs de bataille de la Flandre, il découvre ainsi les conditions impitoyables de la guerre moderne, comme de nombreux autres camarades aussies.

« À quelques kilomètres de là, dans des nids en béton, les mitrailleuses, déjà installées, attendaient. Les machines à coudre de la mort étaient en train de piquer leurs linceuls. »

Auteur réputé en Australie, l’écrivain et poète David Malouf a su trouver les mots justes pour évoquer le traumatisme de la Première Guerre mondiale. L’infinie patience des oiseaux conjugue en effet les qualités d’un récit simple et chargé d’une émotion sincère. Le roman de l’auteur australien exalte une forme de beauté, celle de la nature dans toute son indifférence pour l’existence humaine, mais aussi celle de la vie dans sa fragilité, sa fugacité et son caractère éphémère. Il convoque enfin la faculté de résilience de l’être humain, en dépit des aléas meurtriers de l’Histoire.

Écrit d’une plume imagée, dont on se surprend à relire plusieurs fois les phrases pour en goûter les fulgurances stylistiques et ainsi en faire durer les moments de grâce, L’infinie patience des oiseaux se révèle à la fois d’une profonde tristesse et d’une vitalité ensorcelante. En dépit de l’âpreté de la guerre qu’il décrit sobrement, pour en révéler la violence intrinsèque et l’inanité fondamentale, David Malouf enracine son récit dans l’immanence de l’instant qui ne dure que dans la mémoire.

L’infinie patience des oiseaux est donc un magnifique roman, où les forces de la vie s’opposent à celles de la mort et où la beauté de la nature répond aux affres mortifères de la guerre.

L’infinie patience des oiseaux (Fly away Peter, 1982) de David Malouf – Éditions Albin Michel, collection « Les Grandes Traductions », 2018 (roman traduit de l’anglais [Australie] par Nadine Gassie)

9 réflexions au sujet de « L’infinie patience des oiseaux »

  1. Vraiment très beau.On ne peut rester insensible au personnage de Jim pour qui penser aux oiseaux et à la nature sont un un moyen de s’évader de l’horreur de la guerre.
    La dernière partie est d’une tristesse infinie. On est souvent au bord des larmes.
    Merci pour cette découverte.

  2. Une écriture raffinée, une belle plume,un roman touchant: tous les ingrédients sont réunis.
    Donne envie de découvrir davantage cet auteur australien.

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