L’Opéra de Shaya

Éditeur attitré de Sylvie Lainé, ActuSF nous propose un nouveau recueil de cet auteur que je découvre par la même occasion. J’avoue avoir entendu beaucoup de bien des écrits de la dame, mais le fandom est parfois (souvent) un tantinet complaisant…
Faisant abstraction de mes préjugés, j’ai finalement sauté le pas comme on dit et je n’en suis pas mécontent, même si certains détails m’ont agacé.

Quatre textes sont inscrits au sommaire de L’Opéra de Shaya, dont deux inédits. D’emblée, je n’hésite pas à clamer ma préférence pour « Un amour de sable » où Sylvie Lainé propose la rencontre avec une forme de vie radicalement différente. À partir d’un postulat pas évident à tenir, elle développe un court texte assez impressionnant sur l’impossibilité à communiquer, voire à appréhender l’autre sans le détruire. D’aucuns jugeront la chute de cette nouvelle glaçante, voire cruelle. Elle m’apparaît tout simplement naturelle, du moins au regard du mode de fonctionnement de l’espèce extra-terrestre imaginée ici.
Le second inédit du recueil flirte avec la novella. « L’Opéra de Shaya » repose sur une idée très forte. So-Ann est née dans l’espace et cherche un point d’ancrage terrestre où s’établir. Mais, parmi la poignée de mondes colonisés par les humains, elle n’arrive pas à trouver une planète à sa convenance. Peut-être la solution à son problème se trouve-t-elle sur Shaya où faune, flore et habitants s’adaptent par empathie au visiteur en échange de son ADN.
Ne tergiversons pas, j’ai été ébloui par la richesse et l’étrangeté de l’écosystème de Shaya. La progression dramatique ne ménage guère de temps morts, même si on devine le dénouement très rapidement. Et pourtant, je suis déçu. La faute à un narrateur d’une nunucherie à proprement parlé horripilante.
L’argument de « Grenade dans le ciel » repose sur une idée similaire à celle de L’arbre à rêves de James Morrow. Une sorte d’astéroïde attrape-rêves, y sert de fil directeur. Et pourtant, le sujet n’est qu’effleuré. Propos convenu, rythme mollasson, je passe sur cette nouvelle qui me semble complètement anecdotique.
Reste « Petits arrangements intra-galactiques ». Avec ce texte, on change de registre abordant une certaine forme d’humour décalé. Cette histoire de naufrage et de survie via le mimétisme et la symbiose apparaît tout à fait sympathique. Sans prétention, elle atteint son objectif : amuser le lecteur.

Dans la préface, Jean-Marc Ligny évoque les thèmes abordés par Sylvie Lainé dans ses nouvelles. L’autre mais surtout nous-même, humain limité par nos sens et préjugés, figurent au cœur de ses préoccupations. Je le rejoins sur ces points me permettant de faire un parallèle entre l’auteure et Ursula Le Guin, du moins pour l’ambiguïté du propos et les qualités de plume. Je me joins aussi aux laudateurs de la dame. Elle est une excellente nouvelliste dont je vais m’empresser d’acquérir les autres recueils.

opera-de-shayaL’Opéra de Shaya de Sylvie Lainé – Éditions ActuSF, avril 2014

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